Avant toute chose, je tiens à prévenir que cet article va refléter mon opinion et mon expérience personnelle.
Plus j’avance dans mes réflexions vis-à-vis de mon corps, de ma liberté de choisir, d’être, de me mouvoir, de m’exprimer, plus j’ai l’impression d’avaler comme une « pilule ». Une pilule similaire à celle avalée par Néo dans Matrix: aucune possibilité de revenir en arrière.
Des sujets, des polémiques, des articles qui me semblaient « superflus » hier me paraissent indispensables aujourd’hui. Mon opinion s’enrichit même au fil des lectures.
J’ai l’impression que je dois me défendre et me justifier lorsque je fais un choix, lorsque je parle d’un phénomène qui, à priori, semble anodin. Surtout face aux hommes (#nonpastous). Pourtant, ce n’est pas faute d’avoir lu énormément à ce sujet mais c’est comme si les lectures et les recherches étaient caducs à leurs yeux. Elles n’ont aucunes valeurs car elles ne semblent pas aller dans leur sens.
Lors d’un souper raclette plus que copieux, j’ai oublié comment mais le sujet de l’accouchement est mis à table. Avec moi, trois hommes, dont mon compagnon (qui a depuis revu son opinion). J’explique que si la grossesse n’est pas à risque, j’aimerais autant vivre mon accouchement hypothétique dans l’eau. Suite à quoi « on » m’explique que je n’y connais rien, que c’est très dangereux pour le bébé, que ce ne sera pas pratique pour le praticien, que s’il y a un problème, le temps d’agir ça va prendre trop de temps… (Pourtant un des hôpitaux non loin de chez nous pratique des accouchements dans l’eau #hein). Après quasiment une heure de débat où ils leur étaient visiblement impossible de concevoir que je puisse avoir ne serait-ce qu’un tout petit peu raison. Au début ils me coupaient simplement la parole pour imposer leur vision des choses, à la fin je n’avais même plus de place pour m’exprimer, j’ai laissé tomber.
A d’autres moments, quand le harcèlement de rue est abordé et que je donne quelques exemples sur ce que je réponds quand ça m’arrive (je peux être très cassante et créative), on me dit que je suis méchante, que ça part d’une bonne intention, qu’il ne faut pas le prendre mal, que je suis une « féminazi », que bientôt on ne pourra plus draguer en rue… Bref, les gros classiques. A force de discussions (qui s’étalent sur plusieurs années, je me donne vraiment de la peine), certains finissent par comprendre et qualifier de « gros beaufs » ou « gros lourds » ceux qui pratiquent le harcèlement de rue et voient (enfin) la différence avec la drague.
Plus récemment, je partage un thread sur Twitter (désormais privé). Celui-ci explique que dire à une inconnue dans la rue qu’elle serait plus jolie si elle souriait alors qu’elle pleure, c’est très maladroit et il faudrait éviter. L’auteure ne remet pas en question l’intention (qui est de faire en sorte que l’inconnue se sente mieux et, peut-être, puisse sécher ses larmes) mais l’injonction à sourire que l’on vit au quotidien quand on est une femme. On n’irait pas dire à un mec qu’il devrait sécher ses larmes pour sourire à la place (ce serait plutôt une autre injonction qui jouerait dans ce cas, celle de la virilité: « un homme ne pleure pas »). Là encore, j’ai fini par abandonner et accepter de ne pas être d’accord, aucun des arguments n’étant apparemment convainquant (pas plus que le partage de l’article en lien ci-dessus qui n’avait même pas été lu en entier mais en diagonal et qui lui semblait exagérer certains points).
Autre paragraphe, autre fait divers. Le printemps et l’été ont plutôt mis en avant mon choix d’arrêt de m’épiler (principalement les jambes). Chacun à son petit avis sur le sujet mais, grosso modo, mon choix n’est pas remis en question. A une exception près. Il y a quelques semaines un homme m’a demandé si c’était par flemme ou par « projet féministe ». Il me demandait de lui expliquer pourquoi j’avais décidé de ne plus me raser (« je n’en ai plus envie », « je ne vois pas pourquoi je devrais le faire » n’était pas recevable pour lui). J’ai bien tenté de lui démontrer qu’il faudrait attaquer la question sous un autre angle, « Pourquoi ai-je commencé à me raser ? », « Pourquoi je continuais de me raser ? » mais ça ne rentrait ni dans la case « flemme » ni dans la case « projet féministe ». Le fait que je continue de me raser les aisselles par exemple de temps en temps mais pas les jambes est apparemment difficilement envisageable. C’est tout ou rien. Une fois de plus, j’ai fini par abandonner, mes arguments n’allant pas dans son sens… Étrangement, quand j’en parle avec des femmes, la première réaction que j’ai souvent est « Et ton copain il en dit quoi ? » comme si ça devait être le premier critère sur lequel me baser. Comme si je devais attendre son approbation pour arrêter de me raser les jambes…
Lorsque je m’exprime avec des femmes, j’ai l’impression d’avoir des interlocutrices plus ouvertes sur la question, sur le ressenti, sur les problèmes et les solutions. Parfois, elles ont a la même opinion, parfois pas. Avec les hommes (#nonpastous) j’ai l’impression de devoir sans arrêt me battre pour faire valoir mon point de vue ou le démontrer. Quand on ne me coupe pas la parole, bien entendu… J’en viens même à préciser à chaque fois que non, ce ne sont pas « tous » les hommes (« mais moi je fais pas ça ! » / « mais j’y peux rien s’il y a des cons ! »).
D’autres fois, j’ai comme le sentiment qu’on « choisit » à ma place les sujets sur lesquels je suis en droit de débattre (« Il y a plus important que le harcèlement de rue, regarde, dans certains pays leur visage est brûlé à l’acide ! »). On construit pour moi une hiérarchie (« il y a plus important » ou « c’est pire ailleurs »). Alors que… non. Désolée, je ne suis pas d’accord. Je pense être encore en droit de choisir les sujets pour lesquels je veux faire changer les mentalités…
Bref. Pour conclure cet article, je dirais qu’en ce moment, je suis saoulée.


2 commentaires
Comme je te comprends ! Que tu sois soûlée. Que tu aies envie d’abandonner parfois. (Je ressens un peu la même chose quand je dois me justifier de ne pas manger de viande…)
L’exemple que tu cites sur l’épilation est aberrant ! Après tout c’est ton corps et ça ne regarde personne à part toi, tes poils 😀 Et ça ne m’étonne guère ce qui t’est arrivé sur Twitter… Derrière leurs écrans certaines personnes se lâchent encore plus que dans la « vraie » vie… Bon courage pour tes prochains « débats » en tout cas, et au passage, je trouve tes photos super jolies 🙂
Ton commentaire fait plaisir à lire, merci ! 🙂
Dans cet exemple-là, il se trouve que je le connais aussi « en vrai » mais je suis d’accord avec toi, les gens peuvent se montrer plus virulents sur internet 🙁